suite à une rencontre , peinture et écriture….
De l’Aube à la Garonne, il a fallu plus d’un pas et plus d’une rencontre pour que surgisse, avec quelques surprises, une collaboration entre peinture et écriture.
En écoutant Gabrielle Guinier parler de ses peintures, Mireille Grosse s’est mise à traduire ce qu’elle entendait à sa manière, selon son style, en écrivant les résonances que provoquaient les tableaux en elle : une peinture, deux, puis trois et ainsi de suite…
Peu à peu est né le projet d’inclure ces textes poétiques dans l’exposition de cet été 2015 pour accompagner les peintures. Gabrielle Guinier dit : « lire ces textes me fait voir mes peintures autrement ».
A regarder ou lire pour eux-mêmes, ou l’une à côté de l’autre.

Présentation
des peintures de Gabrielle Guinier
et extraits des écrits de Mireille Grosse

Naviguer droit sur des flots courbes.
le vent sèche les voiles,
conduit le marin en eaux profondes,
là où le vert se joint au bleu
pour unir des contraires,
réunir des filaments épars,
tisser une ancre qui ne périt pas,
amarrer l’homme dans la tempête
et le laisser debout au beau milieu des éléments,
le cœur mouillé de lassitude
et de reconnaissance pour la route tracée,
suivie sans qu’il y prenne garde,
son bon le vouloir étant en berne…..

Privée de ses yeux, elle danse,
de ses pieds monte une lave,
petit filet qui devient dense,
bouscule tout sur son passage.
Les ténèbres reculent,
leur passage appelle la couleur,
des corps, enfin, se meuvent,
visages libérés de la peur …..

Appelés à la liberté
nous parcourons l’espace,
en recherchons les traits,
en décelons les traces.
Les appuis se fissurent,
de nouveaux apparaissent,
faisant une peinture
comme tenue en laisse……

Plumes et chapeaux ne font pas la fête,
tambourins et piano manquent à la musique.
Le rire s’évanouit quand ne demeure personne…..

Blessure ouverte
d’où l’eau jaillit
une arche offerte
fil de la vie .

Du celé au manifesté il n’y a qu’un souffle,
mais quel surgissement, quelle pierre attendrie
laissant passer gouttes et brindilles
pour faire un feu nourri de l’emportement,
apaisé par l’eau d’une rive lointaine,
terre dérobée au-delà du regard.
Mais quelle est donc cette langue familière
jusqu’alors inconnue ?
Proche et étrangère, unique et universelle,
singulière et plurielle,
elle vient habiter l’antre,
abri et berceau de l’humanité,
donner forme au corps jusqu’alors endormi.
Du celé au manifesté il n’y a qu’un souffle.

Le feu s’éloigne.
Une aube rosée soulève la matière,
l’air se fait plus léger, plus respirable,
accentue le contour rouge vif
des fleurs touchées par les flammes.
Etre là pour rien, pour personne,
est-ce bien être là ? …….

Est-ce toi l’amazone au grand cœur ?
Le soleil a-t-il brûlé ta peau ?
Où sont passées toutes tes couleurs
héritées des reflets à fleur d’eau ?
De la rive d’un carnaval de lune,
tu as chevauché un océan comblé,
perdu les gouttes de la lagune,
pour une sylvestre virginité……

Oh, ton ombre est là, claire,
à l’intime de l’intime,
accueillant la lumière
quand je sors de l’abîme.
Un papillon frôle ma joue.
Il est ton vaillant messager
voletant, léger, dans l’air doux
happé par d’inconnues contrées….

Un détroit très étroit,
des colonnes brisées
pour bien le traverser.
Une fracture à peine visible,
déjà la chair regagne de la vie,
une lumière crue se diffracte
par des travées encore encombrées.
Elle donne place au possible, au meilleur,
se laisse conduire par la fraîcheur
d’une eau de source ignorée,
trou noir dans la montagne
disant son origine mais sans la dévoiler….

La nuit obscure
efface tous les contours
fait avancer à ciel ouvert
vers l’inconnu, l’insu.
La tentation de Loth:
un regard en arrière
vers le mirage, le rêvé, la clarté
pour oublier l’incertain…

…Émue de tant de perdition
elle ose s’aventurer
parmi les glaces fondues,
grisées dans l’air bleuté.
Elle remonte la pente,
arpente les forêts
découvre la soupente
d’une ferme habitée…

….Où donc est passée l’arche
pour dire une autre alliance
une paix à travers la tempête
à Noé en pays d’Haïti ….

La fureur a disparu
laissant derrière elle
des lambeaux de chair
des arbres calcinés
une terre éteinte
pour toujours ? A jamais ?….

Que veut-il pour elle ? Que lui répond-elle?
Les grandes lignes semblent faciles,
les cailloux des sentiers sinueux inévitables,
qui font trébucher.
Tomber, certes, mais se relever, être relevé,
être l’invité de la lumière et du mouvement…
c’est super !
MERCI